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Billet d’humeur de la semaine

Pancarte manif : "Nous ne sommes pas pauvres, nous sommes volés !"

Ils veulent tuer la Sécu

Le gouvernement veut diminuer de 5 % la part prise en charge par la Sécu sur les consultations médicales et les médicaments. L’objectif affiché est celui d’économies sur le budget de la Sécu. Mais il faut bien comprendre qu’il ne s’agit pas de diminuer les dépenses mais de transférer leur financement des cotisations sociales vers des assurances.

Il existe deux différences importantes à prendre en compte dans ce changement. Premièrement, les employeurs sont exonérés de toute augmentation des cotisations sociales. Deuxièmement, les assurances maladie complémentaires qui prendront le relais ne reposent pas sur le principe essentiel de la solidarité qui est un des fondements de la Sécu avec des cotisations selon ses moyens et des prestations selon ses besoins. En effet, il ne faut plus parler de « mutuelles » mais bien d’assurances, ce d’autant qu’au fil des réformes, les assureurs privés ont gagné progressivement des parts de marché et sont devenus majoritaires aujourd’hui dans ce secteur. Les conséquences sont catastrophiques pour tous les assurés sociaux. En effet, tout désengagement de la Sécu se traduit par une augmentation des cotisations des complémentaires santé. Par exemple, le montant annuel de la cotisation annuelle d’un contrat proposé par une mutuelle a augmenté de 900 euros, soit de 46 %, entre 2020 et 2025 pour un couple et une couverture de milieu de gamme. Certains avanceront le fait qu’une partie de ces cotisations peuvent être prises en charge par l’employeur. Oui, mais bien souvent à hauteur de 15 euros par mois, soit 180 euros par an. Faites vous-mêmes vos calculs pour savoir qui est le dindon de la farce ! Face à cette situation, il faut comprendre la stratégie des néolibéraux qui nous gouvernent. Elle est très claire : il ne s’agit pas de faire des économies sur la santé mais de transférer le financement de la Sécu vers le marché. L’exemple des Etats-Unis est parlant avec des dépenses de santé qui atteignent près de 18 % du PIB alors que ce chiffre n’est que de 12 % pour la France. Il est facile de comprendre qu’il s’agit bien d’offrir sur un plateau de nouvelles sources de profit à des investisseurs dans un secteur où les « clients » n’ont que le choix de payer ou de renoncer à se faire soigner. Il faut arrêter de croire que la France serait en difficultés du fait du niveau de ses dépenses de protection sociale. Bien au contraire, malgré les difficultés que rencontre actuellement notre système de santé suite à plusieurs décennies de restrictions budgétaires, il reste encore d’un très bon niveau et surtout d’une qualité très supérieure pour un coût moins important que dans les pays qui ont complètement libéralisé le secteur. 

Enfin, comprenons bien que les cotisations sociales ne sont pas des « charges » mais une partie de notre salaire que nous versons à la Sécu pour assurer notre protection sociale. Quand la Sécu ne sera plus qu’un système de charité publique pour les plus pauvres, tout le monde n’aura pas les moyens de se payer une assurance privée pour sa santé et un fonds de capitalisation pour sa retraite.

Dr Christophe Prudhomme