Billet d’humeur de la semaine
Pas Français, pas de soins ?
Il y a quelques jours un collègue du SAMU 93 prend en charge un ouvrier sur la plate-forme aéroportuaire de Roissy victime d’un accident du travail. Il présente une fracture ouverte de jambe qui nécessite une intervention chirurgicale rapide. Le problème n’est pas simple en Ile-de-France car les hôpitaux publics sont surchargés et manquent d’orthopédistes qui sont massivement partis dans les cliniques privées où ils trouvent de meilleures conditions de travail, notamment car, dans la quasi-totalité de ces établissements, ils ne sont plus obligés de faire des gardes de nuit. Après l’appel de plusieurs hôpitaux, une place est finalement trouvée dans un hôpital militaire. Mais quelle n’est pas la surprise du collègue quand il reçoit un appel du chirurgien qui lui indique qu’il n’aurait pas dû accepter de prendre en charge le patient car celui-ci n’est pas de nationalité française. Il s’étonne de cette affirmation car d’une part les hôpitaux militaires prennent en charge régulièrement des civils, d’autre part l’accidenté est en situation légale en France, a un contrat de travail et est affilié à la Sécurité sociale. Le chirurgien accepte d’opérer le blessé et le collègue du SAMU ne relance pas la discussion, mais il signale immédiatement le fait au chef de service avec copie à l’ensemble des équipes. Ce dernier appelle immédiatement la direction de l’hôpital militaire pour demander des explications sur cette mesure totalement inconnue dans notre fonctionnement habituel. Il lui est confirmé qu’il n’existe absolument aucune notification officielle réservant les soins dans les hôpitaux militaires aux seules personnes de nationalité française et que la seule limitation de l’accueil de patients civils peut être liée à des situations particulières avec un nombre de blessés et de malades militaires, limitant ainsi les capacités d’accueil de patients civils. La direction de l’hôpital militaire s’excuse de l’attitude « inappropriée » du chirurgien et précise également qu’il sera convoqué pour lui rappeler les bonnes règles de fonctionnement de l’hôpital dans lequel il exerce.
Dr Christophe Prudhomme